Société

La croyance dans les esprits à Java

Cohabitation avec les esprits

Les javanais pensent qu’ils cohabitent sur terre avec des esprits qu’ils classent en trois catégories : memedi, lelembut et tujul. Si les noms donnés aux esprits peuvent changer de villages en villages, leurs caractéristiques restent les mêmes.

Les memedis

Les memedis sont les esprits qui ressemblent le plus à nos fantômes. On peut les imaginer sous formes de squelettes ou recouverts d’un drap blanc, à l’image de nos fantômes dans l’imagination populaire. Ils peuvent également prendre l’apparence de quelqu’un que l’on connaît ou que l’on a connu. Les memedis sont connus pour effrayer les gens sans pour autant causer de graves problèmes. Ils sont en général plus joueurs que nuisibles. Ils adorent faire des blagues aux gens, comme donner la fessée aux femmes lorsqu’elles prient ou prendre des vêtements dans une armoire et les jeter dans la rivière. Parfois ils peuvent être plus ennuyeux, prenant l’apparence d’un homme pour coucher avec sa femme et engendrant ainsi des enfant-monstres.

Les lelembuts

Les lelembuts peuvent être beaucoup plus dangereux. Ils pénètrent les corps des hommes, les rendant malades ou fous. Une personne possédée mourra si elle n’est pas soignée par un dukun, un sorcier javanais qui peut faire sortie l’esprit en massant l’endroit par lequel il est entré dans le corps. Les javanais prennent très au sérieux ces esprits. Ils ont d’ailleurs développé plusieurs théories sur la possession. Certains pensent que les lelembuts rentreraient dans le corps par les pieds. C’est pour cela qu’il faut se laver les pieds avant de pénétrer dans une mosquée. Pour d’autres, les lelembuts rentrent toujours par la tête des gens. C’est pourquoi la fontanelle d’un bébé doit toujours être recouverte par une mixture d’oignons et de poivre, les esprits étant repoussés par la nourriture épicée.

Les tujuls

Les tujuls sont des esprits qui peuvent aider les gens pour réussir dans la vie, à la manière de quelqu’un qui conclurait un pacte avec le diable. Si les tujuls peuvent un moment être bénéfiques, cette alliance a bien entendu ses effets néfastes pour l’individu dont le comportement peut changer et atteindre une certaine forme de folie.

Dans de nombreux cas (maladie, folie, disparition…) les javanais vont chercher un sens à leurs malheurs (ou bonheurs) dans leurs croyances. Malgré les confusions et les contradictions que l’on peut trouver dans ces croyances, elles présentent une signification plus générale. Elles dépeignent en fait le triomphe de la culture sur la nature. Alors que la culture javanaise progressait, que la forêt tropicale se transformait en rizières et villages, les esprits qui vivaient à Java bien avant l’arrivée des hommes se réfugiaient dans les bois, les volcans et l’océan indien (où Ratu Kidul, la reine des mères du sud et peut être la plus puissante lelembut de Java, attend pour emporter quiconque oserait porter des vêtements verts près de chez elle). Parallèlement, une personne qui devient plus civilisée (c’est-à-dire, dans le modèle javanais, qui croit en Dieu, qui est bon pratiquant et qui a de l’ordre dans sa vie) aura moins de chances de se faire posséder par un esprit. Pour les javanais il faut donc un « ordre » culturel dont le pouvoir permet de combattre les forces du désordre. Cet ordre se ressent dans le comportement des javanais, dans leurs valeurs. En effet rares sont ceux qui expriment facilement leurs émotions. Un javanais aura toujours une certaine retenue; retenue qui, comme la prière, fait partie de cet « ordre » pour contrer les esprits.

 

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