Histoire

L’influence portugaise à l’est de l’Indonésie

Les epices, facteur de confrontation entre indonésiens et européens

A partir du 16e siècle plusieurs pays européens (le Portugal, l’Espagne, les Pays-Bas et la Grande-Bretagne) tentèrent de dominer le marché des épices depuis sa source, c’est-à-dire en Inde et aux Moluques. Ces nations voulaient concurrencer les marchands musulmans qui à l’époque, par leur contrôle de la Méditerranée, détenaient le monopole sur l’import des épices en Europe. La vente des épices pouvait alors rapporter des sommes astronomiques tellement elles étaient convoitées pour leur valeurs culinaires et médicinales. C’est ainsi que l’archipel indonésien fut confronté pour la première fois à des européens.

A la recherche de nouvelles denrées

Les premiers arrivants européens en Indonésie furent les portugais, à l’époque experts de la navigation, de la construction des bateaux et de leur armement. Ils cherchaient alors à prendre le contrôle du marché des épices, mais aussi à étendre l’influence du catholicisme en implantant des églises missionnaires. Après avoir conquis Malacca en 1511, qui leur servit pendant longtemps de plaque tournante pour leur commerce en Asie, les portugais partirent vers l’est à la recherche de nouvelles denrées et richesses. Après une tentative infructueuse d’implantation à Java ouest, ils continuèrent leur route vers les Moluques, connues également sous le nom d’ « îles aux épices ». Ils y créèrent quelques postes de commerce, forteresses et missions, notamment à Ternate et Ambon. Très vite ils se tournèrent vers le Timor où se trouvait le précieux bois de Santal.

Florès, une position stratégique

L’île de Flores ne possédait pas d’épices ni de richesses particulières mais constituait pour les Portugais un point stratégique entre Malacca et le Timor. Ils commencèrent par construire une base sur la petite île de Solor, à l’est de Flores, qui, loin des côtes du Timor infestées par la Malaria, représentait un refuge pour les marchands.

L’implantation du christianisme à Florès

Ce n’est que vers la seconde moitié du 16e siècle que les missionnaires portugais commencèrent à être actifs. La première école missionnaire ouvra ses portes vers 1570 à Larantuka à l’est de Flores. A partir de cette date plusieurs églises furent construites sur les îles de Flores, Solor et Ende. Cette implantation du christianisme à Flores fut largement aidé par la relation qu’entretenaient les Portugais avec le Rajah de Sikka (Flores est), Don Alesu Ximines da Silva, qui fut élevé pendant quatre ans par un prêtre portugais de Malacca. La famille da Silva, dont le dernier Rajah Dom Sentia da Silva abandonna ses pouvoirs politiques après l’indépendance de l’Indonésie, resta toujours fidèle aux Portugais.

L’indonésie, une place commerciale

En 1602, le parlement néerlandais donna à la Compagnie néerlandaise des Indes orientales (VOC) le monopole des activités commerciales et coloniales en Indonésie. A partir de 1605 ils expulsèrent les Portugais des Moluques. Ceux-ci restèrent établis au Timor et dans la région de Flores. En 1859, les portugais vendirent aux hollandais l’intégralité de leurs terres de Flores, à la seule condition que la région reste catholique. L’arrivée des jésuites hollandais en 1865 créa un renouveau du catholicisme à Flores, qui comptait alors environ 3000 fidèles concentrés à l’est de l’île.

Une christianisation rapide

Le catholicisme continua de s’étendre durant les années suivantes. En 1917, la première mission fut fondée à Ruteng, et en l’espace d’une génération l’ouest de Flores fut complètement christianisé. Cette rapide christianisation est en grande partie due au fait que les missionnaires donnèrent le droit aux habitants de conserver leurs habitudes, traditions et croyances animistes qui perdurent aujourd’hui encore tel le Caci, cette fameuse danse guerrière Manggarai. C’est ici que réside la grande réussite du catholicisme à Flores. L’Eglise a toujours su rester tolérante et s’adapter. Par exemple, lors de l’annonce par le gouvernement indonésien de la politique de contrôle des naissances, l’Eglise ne protesta pas. Dans un effort d’améliorer l’économie locale, les missionnaires fondèrent des plantations de palmiers ; ils introduisirent la culture du café (café dont on raffole aujourd’hui à Flores) ; ils offrirent des soins médicaux et aidèrent à l’éducation des enfants. L’Eglise joua un rôle si fort qu’elle était considérée comme un Etat dans l’Etat. Aujourd’hui encore les « padre » sont très respectés et les blancs continuent à être associés aux missionnaires.

Des consonances portugaises toujours présentes

Flores est un bon exemple de l’influence qu’a eu la colonisation portugaise sur l’Indonésie. Sans aborder le cas du Timor Oriental qui resta une colonie portugaise jusqu’en 1975 et où l’influence portugaise est indéniable, l’héritage lusitanien est en effet très limité en comparaison à leur ambition première de contrôler le marché asiatique. Mise à part la christianisation de certaines îles, on peut toutefois citer des noms de famille présents dans l’est de l’archipel (da Costa, Dias, Parera…) et un certain nombre de mots tirés de la langue portugaise que l’on retrouve dans le bahasa Indonesia (pesta, meja, bandera…). Mais on peut surtout citer le keroncong, musique apportée par les marins portugais sur laquelle garçons et filles continuent à se déhancher au quatre coins de l’archipel…

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